Disons le tout net, le banquier ne connait pas grand-chose en général du statut des internes, sauf à savoir qu’il a affaire à un futur médecin. Sans contrat de travail ni convention spécifique, l’interne a parfois du mal à expliquer sa situation professionnelle.
Voici nos conseils pour obtenir un prêt immobilier dans de bonnes conditions.
Sommaire
- Les informations à apporter concernant le statut
- Le détail de la rémunération
- Les aides à l’accession
- Assurance emprunteur : opter pour une délégation
- Quelques conseils
- Les documents à fournir
- Références juridiques
Expliquer le statut au banquier
En dehors des règles communes d’analyse de risque, sachez que les banques ne réagissent pas toutes de la même manière. Certaines considèrent un interne en médecine comme un futur très bon client, d’autres estiment que sans contrat de travail, il n’est qu’un étudiant en santé. Ces disparités d’appréciation d’une banque à l’autre et d’une région à l’autre expliquent pourquoi certains internes obtiennent un prêt immobilier sans trop de difficultés et d’autres, dans une situation similaire, se heurtent à un refus catégorique.
La première chose à faire est d’apporter les informations qui permettent de clarifier le statut. Les articles R.6153-1 et suivants du code de santé publique, modifiés par l’arrêté nº 2010-1187 du 8 octobre 2010 précisent que l’interne est un :
- Praticien en formation spécialisée, rattaché au CHU où il a été affecté suite à son classement ECN avec un temps de travail défini.
- Agent public, même s’il n’a pas le statut de fonctionnaire.
À ce titre, le décret de 2010 ouvre des droits et il est important d’expliquer au banquier qu’il ne peut pas, au regard de la Loi, vous considérer comme un simple étudiant en santé.
Préciser la rémunération des internes en médecine, pharmacie et odontologie
En l’absence de contrat de travail, la rémunération est donnée par le Code de la santé publique, Articles R. 6153-1 à R. 6153-45 du, annexe VIII (à télécharger plus bas).
Années | Montant brut annuel | Prime mensuelle de sujétions | Prime annuelle de responsabilité | Indemnité brute annuelle compensatrice des avantages en nature | ||
Non logé et non nourri | Non logé et nourri | Logé et non nourri | ||||
1re année | 16 506,09 € | 371,23 € | – | 998,62 € | 332,32 € | 662,29 € |
2e année | 18 273,81 € | 371,23 € | – | 998,62 € | 332,32 € | 662,29 € |
3e année | 25 348,46 € | – | – | 998,62 € | 332,32 € | 662,29 € |
4e année | 25 348,46 € | – | 2 026, 11 € | 998, 62 € | 332, 32 € | 662, 29 € |
5e année | 25 348,46 € | – | 4 020 € | 998, 62 € | 332, 32 € | 662, 29 € |
Au montant brut annuel de base, il faut donc ajouter l’ensemble des indemnités et primes pour obtenir le salaire annuel brut et retrancher environ 20% pour charges sociales pour obtenir la rémunération nette qui tient compte des congés payés (30 jours ouvrables par an).
À ajouter :
- Si stage en soins primaires ambulatoires supervisé (SASPAS) : +125 € par mois.
- Si stage en soins ambulatoires, ajouter l’indemnité forfaitaire de transport de 130 € par mois.
Les prêts réglementés
Les aides à l’accession ont subi plusieurs coupes franches. L’essentiel des aides de l’État se résume désormais au prêt à taux zéro, recentré sur les acquisitions dans le neuf et les logements sociaux.
Le prêt à taux zéro
Vous bénéficiez d’un prêt immobilier à taux zéro si vous répondez à ces conditions :
- Vous achetez un appartement dans le cadre du VEFA (ou vous faites construire)
- Vous respectez le plafond de revenus prévu par le dispositif, ce qui est le cas si votre rémunération se limite à celle versée par le CHU.
- Vous n’avez pas été propriétaire au cours des deux ans qui précèdent votre demande.
- Vous habiterez le logement à titre de résidence principale
Important : le PTZ est pris en compte dans le calcul de l’apport personnel.
Les autres prêts aidés
Le PTZ peut se cumuler avec les autres prêts bonifiés comme les prêts épargne logement (CEL ou PEL). Sachez que même si vous n’avez pas de compte à votre nom, vous pouvez bénéficier des droits à prêt de vos parents, frères ou sœurs. Par contre si les taux d’emprunt des CEL sont compétitifs, ceux proposés par les PEL sont nettement en dessus de ceux que l’on trouve à l’heure actuelle sur le marché.
Important : votre statut d’interne ne vous permet pas de bénéficier du prêt action logement (ex prêt employeur).
L’assurance emprunteur
Compte tenu de votre jeune âge, vous n’avez pas intérêt à souscrire à l’assurance groupe de la banque. Vous trouverez des tarifs plus compétitifs en choisissant une délégation externe. La MASCF, l’assureur des professionnels de santé, propose des tarifs très compétitifs que nous vous conseillons de mettre toutefois en concurrence avec ceux d’autres compagnies. Vous pouvez également contacter APRIL, grossiste en courtage d’assurance et un des leaders du marché ou vous rendre sur les comparateurs internet.
Quelques conseils
Comparez les courtiers en crédit
Vous pouvez faire la concurrence vous-même ou vous adresser à un courtier en crédit, surtout si votre emploi du temps ne vous permet pas de dégager le temps nécessaire pour organiser les rendez-vous et étudier les différentes propositions.
Vous pouvez choisir entre les cabinets nationaux et les courtiers locaux. Les premiers ont pour eux de réaliser un gros volume d’affaires qui en font des intermédiaires efficaces face aux banques. Les seconds sont parfois plus disponibles et connaissent mieux le tissu local. Prenez le temps de comparer leurs prestations. Certains prennent des honoraires, d’autres se contentent de la commission bancaire. Dans tous les cas, sachez que peu d’entre eux connaissent le statut des internes en hôpitaux.
Optez pour un prêt modulable
Si vous souhaitez obtenir la mensualité la plus basse, vous devez emprunter sur une durée longue. Les taux fixes sur 20 ou 25 ans restent historiquement bas et avec les prêts modulables, il est possible de raccourcir la durée à tout moment.
Vous pourrez par exemple augmenter vos mensualités lorsque vous commencerez à exercer et que vos revenus seront devenus plus confortables ou même solder le prêt par anticipation.
Important : en prévision d’un remboursement anticipé, pensez à négocier les pénalités prévues généralement par les banques.
Proposez une caution solidaire
En cas de refus, vous pouvez proposer la caution personnelle et solidaire d’un tiers. Celui-ci devra disposer de revenus suffisants pour rembourser le prêt en cas de défaillance de votre part.
Notre conseil : vous pouvez négocier l’insertion d’une clause dans l’acte de cautionnement précisant qu’il sera mis fin à la caution dès que vous commencerez à exercer.
Si vous empruntez avec un co emprunteur
La situation n’est évidemment pas la même si vous empruntez avec un conjoint, à condition que celui-ci bénéficie d’une situation professionnelle stable. Pour le banquier, le risque de crédit sera plus équilibré puisqu’une partie des revenus proviennent d’une activité salariée (ou libérale avec un historique suffisant).
Accords associations d’internes-banques
De nombreuses associations d’internes ont signé des partenariats avec des banques locales comme l’AIEHL de Lille avec BNP Paribas ou l’APIHNS de Nancy avec la Banque Populaire LC. D’autres accords existent comme ceux signés par le syndicat des internes des Hôpitaux de Paris avec le CIC.
Malheureusement, les termes de ces conventions ne s’étendent pas au crédit immobilier, mais elles vous permettront d’établir un contact avec une banque qui connait au moins le statut de l’interne en médecine et qui a su montrer son intérêt pour la profession.
Exemple d’investissement
Prenons l’exemple d’un interne de 4e année : le montant brut annuel est de 25 348 € auquel s’ajoutent chaque année 662 € d’avantages en nature et 2 026 € de prime de responsabilité. Sa rémunération nette mensuelle après déduction des charges est de 1870 €.
Son taux d’endettement maxi (jusqu’à un tiers des revenus) lui permet de rembourser 625 € par mois (montant qui s’apprécie différemment en fonction des banques).
La capacité d’emprunt dépend principalement du choix de la durée (les taux n’ayant pas beaucoup d’incidence).
Durée | Taux d’emprunt hors assurance (1) | Montant |
10 ans | 1 % | 71 700 € |
12 ans | 1,05 % | 84 500 € |
15 ans | 1,15 % | 103 000 € |
18 ans | 1,15 % | 122 000 € |
20 ans | 1,30 % | 132 000 € |
25 ans | 1,55 % | 155 300 € |
30 ans | 2,10 % | 166 800 € |
Cet exemple ne tient pas compte :
- De l’assurance : comptez 0,20 % de taux moyen pour une délégation externe (2)
- Des frais annexes : si vous ne disposez d’aucun apport, les montants indiqués dans le tableau ci-dessus serviront à financer l’acquisition plus les frais de notaire (7,2 % dans l’ancien), les frais de garantie (hypothèque ou caution mutuelle) et les frais de dossier.
- Du type d’acquisition. Si vous achetez un logement neuf, vous pouvez prétendre au prêt à taux zéro dont le remboursement peut aller jusqu’à 25 ans, avec une période de différé pour les 3 premiers profils (dont les rémunérations sont les plus basses). Le profil de remboursement est déterminé à partir du revenu fiscal de référence et dépend de la zone d’acquisition du logement.
(1) : taux moyens constatés début décembre 2019.
(2) : la plupart des contrats souscrits en délégation externe proposent une tarification sur capital restant dû, rendant plus complexe la comparaison des taux. Il est toutefois possible d’obtenir à titre indicatif un taux moyen.
La solution la plus fiable reste toutefois de comparer le montant total des cotisations.
Quels documents à fournir aux banques ?
Si réunir la plupart des pièces justificatives ne pose aucun problème (CNI, relevés bancaires, compromis de vente, avis d’imposition…), certaines preuves en revanche seront plus difficiles à fournir.
En l’absence d’un contrat de travail, le plus simple est d’obtenir une attestation délivrée par le bureau des affaires médicales ou tout autre service confirmant votre affectation et précisant votre salaire brut annuel (primes et indemnités incluses). Certaines banques se contentent d’une simple attestation d’affectation à imprimer sur le logiciel CELINE (auquel vous devez joindre les différents arrêtés et décrets sur les rémunérations.
- Arrêté du 12 juillet 2010 sur la rémunération des internes en médecine, pharmacie et odontologie (aller en annexe VIII)
- Décret n°2014-291 du 4 mars 2014 sur les primes de responsabilité et l’indemnité forfaitaire de transport
- Arrêté du 4 mars 2014 sur le montant de l’indemnité forfaitaire de transport pour les internes qui accomplissent un stage ambulatoire
- Arrêté du 4 mars 2014 sur le montant de la prime de responsabilité pour les internes de médecine générale pendant leur stage autonome en soins primaires ambulatoires supervisé.
- Art. R.6153-1 à 6 du Code de santé publique