Simple à mettre en place, le prêt familial présente bien des avantages pour les proches et s’avérer comme une alternative pratique et économique au crédit bancaire, à condition de respecter certaines règles pour protéger les membres de la famille et éviter une requalification pour donation déguisée.
Les formalités pour rédiger un acte sous seing privé
Vous n’avez pas besoin de passer devant un notaire pour formaliser un prêt familial. Une simple déclaration écrite entre le prêteur et l’emprunteur suffit. C’est d’ailleurs une obligation pour tout montant supérieur à 1 500 €.
La reconnaissance de dette
La reconnaissance de dette est facile à établir, mais qui nécessite toutefois de suivre quelques conseils :
- Rédigez le document à la main. L’original doit être détenu par le prêteur.
- Portez le montant en chiffres et en lettres et datez-le.
- Précisez toutes les conditions de remboursement : délai, périodicité des paiements, taux d’intérêt s’il y a lieu.
- Signez les documents avec la mention « lu et approuvé » avec votre nom et prénom au dessus de la signature.
Notre avis : faites toujours un écrit, même si votre famille est soudée. La relation peut se détériorer même si les liens familiaux sont forts.
Le contrat de prêt
Alternative à la reconnaissance de dette, le contrat de prêt présente l’avantage de détailler les conditions financières de l’avance, notamment lorsque celle-ci est consentie avec intérêts.
Là encore, il n’y a pas de formalisme particulier imposé et vous pouvez rédiger le contrat sur papier libre, mais quelques précautions sont nécessaires pour éviter toute contestation.(1)
Formez des parties distinctes. Vous pouvez par exemple rédiger 3 articles : identification des contractants, éléments du prêt et clauses spécifiques.
- Soyez complet : indiquez le nom, prénom, date de naissance, profession et adresse fiscale du prêteur et de l’emprunteur.
- Détaillez les conditions du prêt : le montant (en chiffres et en lettres), la date de déblocage si elle est différente de celle de la signature du contrat, le taux d’intérêt (2), la durée (en mois de préférence) et la périodicité de remboursement (mensuelle, trimestrielle, semestrielle, annuelle ou libre).
- Notez à part toutes les précisions utiles : pénalités de retard, liste des évènements rendant la dette immédiatement exigible, montant minimum de remboursement partiel…).
(1) : pensez à signer et dater le document
(2) : précisez le type de taux (fixe ou variable). En cas d’indexation, donnez toutes les précisions sur l’indice de référence.
Important : il est indispensable d’établir autant de contrats originaux qu’il y a de personnes concernées.
Si les montant en jeu sont important, nous vous suggérons de passer par un notaire. En général, les frais de rédaction et les honoraires pour une telle prestation sont abordables et vous bénéficierez des conseils d’un professionnel du droit.
Le formulaire 2062
Une solution plus simple consiste à utiliser le formulaire 2062. Ce document téléchargeable sur le site des impôts ou à retirer directement au centre dont vous dépendez comporte deux parties.
- La première concerne l’identité du déclarant, en général l’emprunteur.
- Le second volet du formulaire permet de préciser les caractéristiques du prêt et l’identification des parties.
Pour les couples mariés sous le régime de la communauté ou pacsés (parents ou grands-parents par exemple), il n’est pas nécessaire d’inscrire le nom des deux membres, car la personne signataire engage le ménage. Pour les femmes mariées, indiquez également le nom de jeune fille. Enfin, la case C vous permet de donner toutes les précisions utiles. (Clause suspensive, indexation du taux…).
L’enregistrement aux impôts du prêt familial : une étape essentielle
C’est une démarche importante et même une obligation pour les prêts familiaux supérieurs à 760 €. Vous devez enregistrer le formulaire auprès de votre centre des impôts avant le 15 février de l’année suivant le prêt. Cette formalité vous permettra de :
- Donner une date certaine au prêt.
- En cas de non-remboursement, engager un recours à l’encontre de l’emprunteur.
- En cas de décès, prouver la nature de la dette et prévenir tout litige qui pourrait survenir entre frères et sœurs.
- En cas de contrôle fiscal, apporter la preuve qu’il ne s’agit pas d’une donation déguisée.
Comptez 125 € pour le droit d’enregistrement. L’amende pour défaut de déclaration est quant à elle fixée à 150 €.
Important : le montant de 760 € s’apprécie au 31 décembre de chaque année. Ainsi, si plusieurs prêts ont été contractés dans l’année, c’est le cumul annuel qui sera pris en compte par l’administration. Si celui-ci dépasse le seuil, chaque prêt doit faire l’objet d’une déclaration même s’il est inférieur à 760 €.
Passer par un notaire
Même s’il n’y a aucune obligation de passer devant un notaire et que la solidarité familiale prime généralement sur les formalités, on ne doit pas faire perdre de vue qu’une simple mésentente peut détériorer les relations affectives qui existent entre les membres de la famille. Pensez également que le point de vue des enfants peut être influencé par un conjoint et qu’il n’est pas rare que des divergences naissent entre les membres d’une fratrie.
C’est pourquoi de faire rédiger le contrat de prêt familial par le notaire, notamment si le montant est important L’acte authentique constitue une preuve opposable aux tiers et fait force d’exécution en cas de problème. De plus, en tant que professionnel du droit, le notaire veille à préserver les intérêts des deux parties.
La fiscalité des intérêts
Les intérêts doivent faire l’objet d’une déclaration fiscale et être reportés sur l’imprimé fiscal unique 2561 (IFU). Vous avez le choix entre le prélèvement libératoire à la source de 24 % ou le report sur la déclaration de revenus, soumis au barème progressif de l’impôt.
Aider ses enfants à devenir propriétaire
C’est souvent à l’occasion d’un projet immobilier que la solidarité familiale se manifeste, le niveau des prix de l’immobilier rendant nécessaire une aide financière des parents ou des grands-parents pour permettre aux enfants d’accéder à la propriété.
Si vous devez déclarer l’emprunt à la banque, vérifiez au préalable que cela ne pose pas de problème au niveau de l’endettement. Même si le banquier n’apprécie pas la charge financière provenant de l’entraide familiale comme il le fait pour emprunt classique son remboursement risque malgré tout d’être pris en compte dans le calcul du taux d’endettement du foyer.
Les risques de requalification
Il existe toujours un risque que l’administration fiscale requalifie le prêt familial en donation déguisée, même si la plupart des aides financières entre parents et enfants sont inférieures au plafond d’exonération des donations. C’est pourquoi la formalisation par écrit et l’enregistrement auprès des services des impôts sont nécessaires, de même que la conservation des preuves de chaque remboursement.
D’autre part, vous n’êtes pas à l’abri d’une contestation d’un membre de la famille (frère ou sœur par exemple).
Le remboursement de la dette
Il est préférable d’effectuer les paiements par chèque ou virement et d’en conserver une trace en cas de contrôle fiscal ou de contestation. Si vous effectuez malgré tout un versement en liquide, demandez un reçu sur lequel figure le nom du payeur, le montant du remboursement (en lettres et en chiffres), la date et l’objet du versement.
Que devient le prêt en cas de décès ?
En cas de disparition d’un des cocontractants, la dette est transmise aux héritiers et entre dans l’assiette de succession.
- En cas de décès de l’emprunteur, ses héritiers doivent rembourser le prêt au créancier.
- Si c’est le prêteur qui décède, ses héritiers bénéficieront du remboursement.
Que se passe-t-il en cas de non-remboursement ?
Deux cas de figure peuvent se produire.
Premier cas : vous transformez la dette en donation
Vous avez fait un prêt familial à un proche (un enfant par exemple) et vous souhaitez lui en faire cadeau. Il est de ce fait transformé en donation.
En fonction du montant il est conseillé de le déclarer à l’administration fiscale.
En revanche, cette donation doit s’apprécier également au regard des autres membres de la fratrie. Il faut en effet veiller à ne pas déshériter les frères et sœurs. Si vos moyens le permettent, l’idéal consiste à ce que chacun des enfants reçoit la même somme.
Notre avis : si l’aide ne porte que sur quelques centaines d’euros, il n’est pas nécessaire de le déclarer, car en fonction de vos revenus, elle devrait être considérée comme un simple présent d’usage.
Second cas : vous exigez le paiement
Vous souhaitez obtenir le remboursement : vous devez dans un premier temps exiger le règlement de la dette par courrier en recommandé avec accusé de réception. Si cette démarche n’aboutit pas, vous devrez entamer une procédure juridique qui dépend du montant.
- Jusqu’à 4000 €, auprès du juge de proximité
- De 4000 à 10000 €, auprès du tribunal d’instance
- Pour toute somme supérieure à 10 000 €, auprès du tribunal de grande instance.
À savoir : une requête auprès du tribunal de grande instance ne peut être effectuée que par un avocat.