Les auto-entrepreneurs sont-ils pris au sérieux par les banques ? A en juger l’approche de certains conseillers bancaires et les nombreux refus de prêt immobilier, l’auto-entrepreneur candidat à l’accession à la propriété a du souci à se faire. Nos conseils pour lever les obstacles et un simulateur en fin de page pour déterminer votre capacité d’emprunt.
Sur quels critères vous prête la banque ?
Les critères liés à toutes les professions
Certains éléments de l’analyse de risque concernent tous les emprunteurs quel que soit leur statut, ce qui n’empêche pas le banquier d’être plus regardant sur le dossier de prêt immobilier d’un travailleur indépendant et plus encore lorsque ce dernier a opté pour le statut d’AE.
Le taux d’endettement
C’est le premier obstacle à franchir. La règle veut qu’un emprunteur ne rembourse pas plus d’un tiers de ses revenus. Encore faut-il s’entendre sur les éléments pris en compte par la banque. Et la réponse n’est pas simple puisque chacune d’entre elles a ses propres règles d’analyse, même si l’étude de risque repose sur des notions communes à chaque organisme de prêt.
Le respect de la limite du taux d’endettement à 33 % des revenus n’est pas une obligation légale et rien n’empêche le banquier d’y déroger si le « reste à vivre » est suffisant ou si le dossier de crédit immobilier comporte de nombreux éléments positifs. A contrario, il peut très bien refuser la demande d’un emprunteur dont l’endettement se situe aux alentours de 20 ou 25 % si les revenus sont trop irréguliers ou aléatoires.
Notre avis : l’auto entrepreneur ne doit pas dépasser un tiers des revenus, tous emprunts confondus (prêt consommation, réserve d’argent, etc.) et assurance incluse. Mais le fait de maintenir l’endettement en dessous des normes recommandées ne l’assurera pas de décrocher le précieux sésame.
Le reste à vivre
Il faut surtout avoir à l’esprit que le calcul de l’endettement n’est pas complet sans l’analyse du « reste à vivre ». Cet élément est devenu prépondérant depuis le début de la crise financière. Le solde disponible, une fois payé l’ensemble des mensualités de crédits, assurances incluses, doit être suffisant pour permettre de régler l’ensemble charges du ménage. C’est certainement plus facile pour un couple de cadres supérieurs qu’un auto-entrepreneur en phase de démarrage, d’autant plus s’il a des enfants à charge.
Notre avis : là encore, il n’y a pas de ratio idéal ou de montant défini, chaque banque ayant ses propres règles. C’est donc une appréciation financière qui appartient au service d’analyse de risque et qui juge le dossier dans un contexte global où tous les éléments sont pris en compte.
L’apport personnel
Si vous envisagez de financer votre achat immobilier et les frais annexes, c’est-à-dire les frais de notaire et de garantie par un prêt immobilier, votre dossier devra présenter de sérieux atouts par ailleurs. Soyons clairs : il ne faut pas cumuler plusieurs points négatifs, le statut d’auto-entrepreneur étant parfois (à tord) synonyme de petit chiffre d’affaire et de précarité et de ce fait pas toujours très apprécié des banquiers.
Un apport personnel risque donc d’être indispensable, ne serait-ce pour financer les frais de notaire. Comptez un peu plus de 7,3 % du prix d’achat dans l’ancien et 2,5 % dans le neuf. Le scénario idéal consiste même à apporter 10 % du montant de l’acquisition + les frais de notaire. Vous montrez ainsi au banquier que vous êtes capable de mettre de l’argent de côté et diminuez le risque de crédit.
Exemple : si vous achetez une maison dans l’ancien au prix de 150 000 €. Un apport de 10 % reviendrait à disposer de 15 000 € plus les frais soit : 26 000 €.
Les prêts réglementés
La plupart des prêts bonifiés par l’Etat comme le PTZ, les prêts épargne-logement ou le prêt Action logement (si un des conjoints est salarié) sont pris en compte dans le calcul de l’apport personnel. Un avantage pour tous ceux qui ne disposent pas d’économies personnelles.
Toutefois, le banquier fait la distinction avec l’épargne personnelle de l’emprunteur et l’apport issu des prêts réglementés n’a pas la même valeur à ses yeux. D’autre part, certains emprunts comme le PTZ ne peuvent servir qu’à financer l’acquisition et ne peuvent en aucun cas être affectés au financement des frais de notaire.
La bonne tenue des comptes bancaires
Certes, votre qualité de gestionnaire n’est pas le premier critère, mais autant vous donner un maximum de chances. Vous devez présenter les relevés bancaires des 3 derniers mois, alors évitez les soldes négatifs et surtout veillez à ce qu’il n’y ait aucun incident de paiement. Le moindre rejet de prélèvement ou chèque rejeté aura une conséquence immédiate et vous risquez dès lors de vous heurter à un refus définitif.
Notre conseil : dès que vous entamez vos premières recherches, mettez vos comptes « sous surveillance » afin de présenter des relevés de compte positifs.
Les critères liés au statut d’auto entrepreneur
Un recul suffisant de l’activité
C’est un point sur lequel achoppe souvent l’auto-entrepreneur. Pour le banquier, l’ancienneté est d’ailleurs un critère qui revêt plus d’importance quand il s’agit d’un AE que lorsque la demande émane d’un autre travailleur indépendant (artisan, commerçant ou profession libérale). Il faut dire que malgré le succès rencontré, le statut n’apporte pas toujours la confiance nécessaire. La faute à une méconnaissance de « l’auto-entrepreneuriat » mais aussi au fait qu’il y a encore peu, l’AE était dans le collimateur des pouvoirs publics.
Dans tous les cas, il faudra que l’organisme de prêt ait un recul d’activité suffisant. Pour les TNS, on a pour habitude de dire que 3 ans d’activité permettent au banquier d’avoir un recul satisfaisant pour porter un jugement sur la pérennité de l’entreprise, 2 années pleines constituant le minimum. Il en va de même pour l’auto entrepreneur.
La régularité du chiffre d’affaires et des revenus
On l’a vu, exercer depuis plusieurs années est un critère important pour l’organisme de prêt, mais encore faut-il en être en mesure d’en tirer des revenus suffisants. Mais outre le niveau des revenus, le banquier analysera la régularité des rémunérations. Si les rentrées se font chaque mois, ce sera un plus dans votre dossier et cela montrera au banquier que vous savez gérer votre entreprise.
Les revenus pris en compte
Ne vous basez pas sur le chiffre d’affaires ni même les revenus déclarés. Quel que soit votre choix fiscal – prélèvement forfaitaire libératoire (PLF) ou régime de la micro-entreprise -, sachez que la banque se base en général sur les 2 derniers avis d’imposition.
Cas où les co-emprunteurs sont tous deux auto entrepreneurs
C’est la situation la moins favorable. Si vous empruntez en couple et que vous exercez tous les 2 comme auto entrepreneurs, vous devrez présenter un dossier qui ne comporte aucun point faible avec des activités bénéficiant d’un recul d’au moins deux ans pour chacun d’entre vous (3 années est un plus) et les revenus devront être suffisants et réguliers.
Vous devrez également financer au minimum les frais de notaire. Des emprunteurs respectant toutes ces règles se sont déjà vu signifier un refus (1), c’est dire toute la difficulté de la tâche, mais là encore tout dépend de votre situation personnelle et de la banque à laquelle vous vous adressez.
(1) : vous avez la possibilité de proposer qu’un membre de votre famille se porte garant en cas de défaillance. Il faut toutefois être particulièrement vigilent car la caution solidaire et personnelle engage le patrimoine de la personne cautionnaire.
Cas où l’un d’eux est salarié
Si l’un d’entre vous bénéficie d’un statut de salarié qui plus est, avec un CDI à la clé, vous augmentez forcément vos chances d’aboutir. La banque appréciera que le risque lié à l’activité d’auto entrepreneur ne concerne qu’un emprunteur sur deux. Mais si cette situation constitue un plus, elle ne garantit pas non plus que vous obtiendrez votre prêt immobilier.