Si la formule intéresse en premier lieu les investisseurs qui adossent une assurance vie à un prêt in fine, il faut reconnaître que le nantissement d’un contrat de placement ne manque pas d’atouts pour remplacer l’hypothèque ou la caution mutuelle et éviter de souscrire un contrat d’assurance emprunteur. Mais le nantissement est aussi un action lourde de conséquences.
Présentation avec nos experts.
Sommaire
- Définition
- La rédaction de l’acte
- Fonctionnement
- Le nantissement dans le cadre d’un prêt in fine
- Nantir un contrat d’assurance vie
- Avantages et contraintes par rapport aux autres garanties
- L’extinction du nantissement
Définition
Le nantissement consiste à mettre un ou plusieurs placements en garantie d’un prêt immobilier, le plus souvent pour financer un investissement locatif.
L’acte signé entre l’établissement bancaire et l’emprunteur s’effectue le plus souvent sous seing privé, même si dans certains cas la convention de nantissement peut faire l’objet d’une signature chez le notaire. Il engage la valeur acquise du placement, le plus souvent un contrat d’assurance vie. Le titulaire conserve la propriété du contrat nanti, mais accepte de ne plus effectuer aucun acte de gestion jusqu’au terme du prêt.
En cas de défaillance de l’emprunteur, le placement nanti permet à la banque d’être remboursé.
D’un point de vue juridique, le nantissement conventionnel (par opposition à judiciaire) est une sûreté réelle au même titre que l’hypothèque. Lorsqu’il vient en couverture d’un prêt immobilier, il se définit comme un contrat par lequel une personne dénommée le débiteur affecte en garantie un bien incorporel.
Négociez chaque clause de l’acte de nantissement
Depuis l’ordonnance de 2006, il n’est plus nécessaire que le débiteur remette son titre au créancier. En effet, un simple document appelé acte de nantissement, signé en trois exemplaires par les deux parties, suffit pour établir la convention.
Cet écrit est obligatoire et précise les conditions dans lesquelles s’effectue l’affectation du contrat nanti.
À noter que lorsque le nantissement est effectué en garantie d’un prêt immobilier, il n’est pas nécessaire de publier l’acte. Celui-ci est le plus souvent établi entre la banque et l’emprunteur, mais vous pouvez demander à passer par un notaire.
Certaines banques facturent des frais de nantissement. Un point que vous négocierez très facilement si le placement nanti est souscrit auprès de l’organisme prêteur. En cas de délégation de créance, vous pouvez vous adresser directement au gestionnaire de placement pour rédiger l’acte de nantissement et le transmettre à la banque.
Important : nous vous conseillons de négocier chaque condition : quotité de placement requise, clause d’arrosage, autonomie de gestion, nantissement partiel…
Fonctionnement
Les titres qui peuvent être nantis
En théorie, n’importe quel titre de placement peut être mis en nantissement d’un prêt immobilier :
- Un contrat d’assurance vie
- Un compte titre
- Un PEA
- Un compte à terme
- Un compte sur livret
- Un plan d’épargne salariale
- Un PEP
Dans la pratique, la banque privilégie la sécurité afin de garantir la valeur du placement à terme. À noter que le nantissement s’étend aux intérêts futurs, attributions d’actions gratuites, dividendes et autres revenus financiers venant grossir la valeur du placement.
Les titres sont ensuite déposés sur un compte spécial.
Le montant
Le montant à nantir dépend bien sûr du capital emprunté, mais aussi de la qualité du dossier de et de la nature des actifs mis en nantissement.
La quotité exigée généralement par les banques pour les supports euros des contrats d’assurance vie varie de 80 à 100 % du capital emprunté. Cette quotité peut être revue à la baisse en cas de répartition plus dynamique (une partie sur des supports obligations ou actions).
Le service d’analyse de risques de la banque peut toutefois exiger une couverture supérieure au capital emprunté, par exemple 120 % ou bien alors demander une garantie complémentaire (caution ou hypothèque) s’il estime que l’exposition aux marchés financiers est trop importante.
Enfin, sachez que la valeur initiale du placement peut être complétée par des versements réguliers, une option proposée par la plupart des contrats d’assurance vie multisupports.
À savoir : la banque peut tout bonnement refuser le financement si elle juge que les actifs sont trop exposés aux marchés boursiers.
La clause d’arrosage
Il n’est pas rare de voir les banques insérer une clause d’arrosage sur les supports à risques. Elle oblige le débiteur à combler les moins-values éventuelles par des versements complémentaires et à maintenir la valeur au niveau fixé dans l’acte de nantissement et en cas d’impossibilité de rembourser tout ou partie du prêt immobilier.
Le nantissement partiel
Si la valeur du placement est supérieure au montant exigé par la banque, vous pouvez proposer un nantissement partiel. Il en effet possible de fixer un plafond au-delà duquel la valeur n’est plus nantie. Cette solution permet d’effectuer des retraits dans la limite d’un seuil fixé dans l’acte et de garder la main sur la gestion d’une partie des fonds. Il est possible également d’effectuer des versements complémentaires hors champ de nantissement.
La délégation de créance
Elle permet de nantir un contrat déjà existant. Il suffit pour cela de demander au gestionnaire de rédiger un avenant.
Important : dans la pratique, les banques tentent de « récupérer » le placement au risque parfois de faire perdre l’antériorité fiscale au client.
Le nantissement de parts de SCI
Les parts de SCI sont très rarement acceptées en garantie d’un prêt immobilier. Il faut dire qu’une décision de la Cour de cassation du 5 mars 2009 a limité la responsabilité du notaire en cas de vente du bien. Elle précise que ce dernier n’est pas tenu de consulter le registre des nantissements lorsque le cadre de sa mission se limite à la vente immobilière.
Le nantissement dans le cadre d’un prêt in fine
Bien connu des investisseurs, le prêt in fine adossé à une assurance vie est une forme particulière de financement qui permet d’optimiser l’aspect fiscal de l’opération.
Le mécanisme repose sur le différé d’amortissement qui permet à l’emprunteur de ne payer que les intérêts pendant la durée du prêt, le capital étant remboursé en une seule fois au terme de l’opération.
La part des intérêts du prêt in fine est plus importante que sur un crédit amortissable ce qui a pour effet de baisser l’impôt foncier.
D’autre part, lorsque le taux de rendement du placement est supérieur au taux d’intérêt du crédit immobilier, l’investisseur peut réaliser une belle plus value.
Il n’en reste pas moins que le nantissement d’une assurance vie associé à un prêt in fine nécessite un montage relativement complexe et il convient d’établir plusieurs plans de financement afin de mesurer l’impact fiscal réel.
À savoir : l’effort d’épargne de l’investisseur est pratiquement nul dans le cadre d’un prêt in fine, la mensualité étant réduite du fait du différé d’amortissement.
Nantissement d’un contrat d’assurance vie
Les banques privilégient l’assurance-vie et plus particulièrement les fonds en euros, les investissements sur les OPCVM ou sur les fonds profilés étant par ailleurs souvent exclus. Si, comme beaucoup d’épargnants, vous avez placé votre argent sur des supports dynamiques, il est possible que l’établissement bancaire exige un arbitrage vers le fonds euros avant de nantir le contrat.
Dans la pratique, sachez que les banques n’hésitent pas à exercer une pression orale sur leurs clients pour les inciter à souscrire le contrat d’assurance vie chez elles. Certaines vont même jusqu’à refuser le prêt si les fonds sont gérés en externe.
À savoir : vous n’êtes pas contraint d’informer le bénéficiaire. Toutefois, dans les rares cas où ce dernier a accepté par écrit le bénéfice du contrat, vous devrez obtenir son accord pour nantir l’assurance vie.
Avantages et contraintes
Deux avantages
Outre l’avantage fiscal dont bénéficie les investisseurs qui financent un bien locatif à l’aide d’un prêt in fine, l’adossement d’un contrat de placement permet à l’emprunteur de réaliser de belles économies.
Se passer de l’assurance emprunteur
En principe, la banque exige que vous souscriviez une assurance couvrant le décès et l’invalidité et dans le cas d’une résidence principale, l’incapacité temporaire de travail.
Le nantissement permet dans biens des cas d’éviter l’assurance emprunteur puisqu’en cas de défaillance due à un problème de santé, la banque dispose du placement pour rembourser le prêt immobilier.
Économiser sur le coût de la garantie
Le nantissement est beaucoup plus économique que l’hypothèque qui peut coûter jusqu’à 2 % du montant du prêt (sans compter les frais de mainlevée) et le privilège prêteur de deniers ou même que la caution. Pour information, CREDIT-LOGEMENT coûte 1,25 % avec le barème « classic ».
Attention toutefois aux frais de nantissement, certaine établissements bancaires n’hésitant pas à facturer quelques centaines d’euros de traitement administratif.
Et deux inconvénients majeurs
Interdiction d’effectuer tout retrait ou arbitrage
Même si l’emprunteur garde la propriété du contrat, il perd la main sur la gestion de son opération. Dès la signature de l’acte de nantissement, il ne peut plus effectuer de retrait ni demander d’avance sur son contrat d’assurance vie. Il lui est par ailleurs interdit d’effectuer tout arbitrage, tant bien même il serait nécessaire à la bonne gestion du placement.
Dans certains cas, la banque permet de changer de support à la double condition :
- De l’avertir avant toute décision de modification.
- De respecter un seuil minimal d’affectation sur le support en euros.
Une autre solution consiste à lui demander d’insérer une clause permettant de reprendre la main au fur et à mesure du remboursement.
Enfin, en cas de difficulté financière, vous pouvez également demander une mainlevée partielle, à condition que la valeur du placement au moment de la demande soit supérieure au capital restant dû.
Intégration de la valeur de rachat du contrat d’assurance vie en cas de décès
Une décision de la Cour de cassation en date du 9 février 2012 a confirmé que la valeur de rachat d’un contrat d’assurance vie doit être intégrée à la succession quand bien même le capital serait versé à la banque. Aussi aberrante que soit cette situation, la décision de la Haute cour est sans équivoque.
Il faut néanmoins que deux conditions soient réunies :
- Le contrat d’assurance vie est toujours en nantissement au jour du décès.
- Le titulaire n’a pas désigné de bénéficiaire (la clause standard indiquant les héritiers s’applique) et a demandé par écrit la suspension de la clause bénéficiaire, ce qui est généralement imposé par la banque dans l’acte de nantissement.
Extinction du nantissement
La garantie démarre le jour de la signature de l’offre et prend fin au terme du prêt ou en cas de remboursement anticipé par l’emprunteur. La banque procède alors à la mainlevée du nantissement sans aucuns frais supplémentaires. Le bénéficiaire retrouve alors tous ses droits.
Attention : un délai administratif est nécessaire pour que la mainlevée soit effective, ce qui dans certains cas peut prendre plusieurs mois. C’est pourquoi il est conseillé de demander la levée du nantissement dès l’entrée du dernier mois du prêt.
Références juridiques
- Ordonnance de 2006
- Article L211-20 du Code monétaire et financier sur le nantissement des comptes titres
- Article L132-10 sur l’acceptation du bénéficiaire d’un contrat d’assurance vie
- Succession d’une assurance vie nantie
- Vente d’un bien dans le cadre d’une SCI dont les parts sont nanties
- Articles 2355 à 2366 du Code civil