Le niveau historiquement bas des taux fixes a conduit les banques à mettre de côté leurs offres de prêt immobilier à taux variable. Une situation confortée par des indices de référence devenus aujourd’hui négatifs, comme l’EURIBOR, mais qui pourrait bien s’inverser si la hausse des taux d’intérêt observée depuis plusieurs mois devait se poursuivre. L’analyse avec CREDITAS du fonctionnement, des avantages et des risques des taux révisables.
Sommaire
- La marge de la Banque
- L’EURIBOR : indice de référence le plus utilisé
- Taux variable capé et mensualités constantes : comment sécuriser son prêt
- Passage à un taux fixe
- Alternatives au taux révisable
- Rachat par la concurrence
- Choisir entre un taux fixe et un taux variable
Composition et définition du prêt révisable
Chacun sait que le mécanisme de variation du taux d’intérêt est fonction d’un indice de référence (le plus souvent l’EURIBOR à 3 mois ou à 1 an). En revanche, ce que l’emprunteur sait moins c’est que l’indexation ne s’applique qu’à une seule partie du taux, qui est composée de deux éléments :
- La marge de la banque, qui reste fixe pendant toute la durée du prêt.
- L’indice de référence (ou index), qui suivant le contrat peut impacter à la hausse ou la baisse soit les mensualités soit la durée de remboursement, suivant le choix de l’emprunteur.
Pour comprendre comment fonctionne le prêt à taux variable et pouvoir comparer les offres bancaires, il est donc nécessaire d’analyser ces deux éléments.
La marge de la banque, élément central de la négociation
Également appelée marge de révision, elle correspond à la rémunération de l’organisme prêteur. Exprimée généralement en pourcentage, mais parfois en points de base (un point représentant 0,01 %), son montant reste fixe tout au long du prêt et s’ajoute à l’indice de référence pour composer le taux variable.
Pour comparer deux propositions utilisant le même index, vous devez donc connaître la marge appliquée par chacune d’elle.
Notre analyse : c’est un élément que le banquier apprécie en fonction de la qualité du dossier. N’hésitez pas à négocier son montant au même titre que les autres éléments de l’emprunt.
Définition de l’EURIBOR
Faisant suite au PIBOR, supprimé au 1er janvier 1999, l’EURIBOR (Euro Interbank Offered Rate) correspond au taux moyen de l’argent pratiqué à court terme et sans garantie (prêts en blanc) entre un échantillon large de banques en Europe sur une période donnée, appelée échéance.
Ce taux d’intérêt interbancaire sert à la fois de base aux échanges entre les établissements et de référence à de multiples produits financiers comme les prêts révisables ou les opérations d’épargne.
Les banques sont choisies pour leur réputation en termes de solvabilité par la Fédération des Banques Européennes sur la base des résultats donnés par les agences internationales de notation. Y figurent quelques établissements français :
- BNP Paribas
- Crédit Agricole
- HSBC France
- Réseau Natexis Banques Populaires et Caisses d’Épargne
- Société Générale
Si la plupart des taux révisables sont indexés sur l’EURIBOR à 3 mois, sachez que certaines offres bancaires se basent sur une échéance plus lointaine (6 mois ou 12 mois par exemple). Par ailleurs, d’autres index peuvent être choisis, comme l’EONIA (Euro Overnight Index Average) ou le TME (Taux moyen des emprunts d’État).
Pour comparer deux propositions bancaires, il est donc nécessaire de connaître l’instrument financier sur lequel le prêt révisable est indexé.
Enfin, sachez que certaines banques proposent de se référer sur une moyenne de l’indice de référence, ce qui permet d’amortir la hausse en cas de fluctuations extrêmes dans la période.
Important : les conditions d’indexation doivent figurer dans l’offre préalable.
Le taux EURIBOR est une moyenne établie chaque jour sur la base des échéances transmises par l’échantillon représenté par les principales banques européennes. Son cours est donc le résultat de l’offre et de la demande, mais son niveau dépend aussi des conditions économiques. Pour que la diffusion de l’indice soit possible, il faut qu’au moins la moitié des banques aient transmis une échéance.
Évolution du taux EURIBOR sur les 10 dernières années | ||||
Année (1) | À 1 mois | À 3 mois | À 6 mois | À 12 mois |
2012 | 0,109 | 0,186 | 0,2 | 0,543 |
2013 | 0,216 | 0,287 | 0,389 | 0,556 |
2014 | 0,019 | 0,078 | 0,171 | 0,327 |
2015 | -0,206 | -0,13 | -0,041 | 0,059 |
2016 | -0,368 | -0,319 | -0,221 | -0,082 |
2017 | -0,372 | -0,332 | -0,249 | -0,124 |
2018 | -0,368 % | -0,329 % | -0,271 % | -0,186 % |
2019 | -0,362 % | -0,310 % | -0,238 % | -0,121 % |
2020 | -0.540 % | -0,520 % | -0,513 % | -0,486 % |
2021 | -0,557 % | -0,558 % | -0,529 % | -0,443 % |
(1) : à novembre |
Méthode de calcul
Important : la banque ne vous informe pas régulièrement de l’évolution du cours de l’indice de référence et ne transmet un nouveau tableau d’amortissement que sur demande (qui peut être payante).
Manipulations présumées : plusieurs banques condamnées à de fortes amendes
En 2012, le scandale sur les manipulations présumées du LIBOR et de l’EURIBOR par certaines grandes banques internationales avait conduit à une enquête de la Commission Européenne. Cette dernière a condamné fin 2016 plusieurs d’entre elles à de fortes amendes (plus de 8 milliards d’euros au total).
Ce scandale portait sur l’entente présumée de plusieurs banques sur l’évolution des indices et avait clairement posé la question d’un encadrement indépendant. C’est chose faite puisque la fixation du cours est désormais soumise à des procédures plus strictes et supervisée par l’AEMF (Autorité Européenne des Marchés Financiers).
EURIBOR négatif, et après ?
Avec un EURIBOR à 3 mois inférieur à zéro (-0,330 % en avril 2017) – un scénario inimaginable il y a quelques années – les propositions de prêt immobilier à taux variable ne devraient pas revenir sur le devant de la scène avant longtemps.
D’ailleurs, les établissements prêteurs ne transmettent plus les grilles tarifaires de prêts révisables à leurs partenaires courtiers et certaines d’entre elles ont décidé de supprimer purement et simplement leurs offres.
Notez que certaines banques belges ou danoises ont accepté de rémunérer leurs clients, mais les banques françaises n’entendent pas mettre la main à la poche.
À ce jour 400 clients ont décidé de porter plainte et exigent de bénéficier de cette conjoncture exceptionnelle. Une démarche qui a toutefois de faibles chances d’aboutir au regard du droit civil français et du fait que la plupart des contrats de prêt comportaient un cap à la hausse comme à la baisse.
D’autre part, comme nous l’avons vu, l’indice de référence s’ajoutant à la marge de la banque, il faudrait que celle-ci soit inférieure à 0,330 % (niveau du taux négatif) pour que le taux variable soit à sont tour inférieur à zéro.
Sécuriser un prêt à taux variable
L’emprunteur a la possibilité de sécuriser partiellement le mécanisme d’indexation :
- En reportant l’impact de la hausse sur les mensualités.
- En optant pour un prêt capé, qui permet de plafonner la hausse.
Prêt capé
L’obligation d’information sur les prêts révisables a évolué depuis la Loi LAGARDE et l’introduction de la notion de « crédit maîtrisable » qui oblige l’organisme prêteur à proposer en parallèle à un prêt immobilier à taux variable une solution alternative « sécurisée » qui peut être au choix un taux capé ou fixe.
Un taux est dit « capé » lorsque le contrat prévoit un plafond de hausse. Par exemple, un prêt capé 1 signifie que le taux d’intérêt ne pourra pas augmenter de plus de 1 %.
Notez que certaines offres bancaires prévoient à la fois un plafond à la hausse (cap) et un taux plancher (floor). La variation reste alors les limites prévues par ce « tunnel ».
Notre analyse : il est fortement conseillé de privilégier un taux capé 1. D’ailleurs, les banques ne proposent quasiment plus de prêt à taux variables « purs » ni même de taux capé 2.
Mensualités constantes et allongement de la durée
Il est possible de conserver une échéance constante, même en cas d’augmentation de l’index. L’emprunteur peut choisir d’imputer la hausse sur la durée du prêt plutôt que d’impacter l’échéance. Ainsi, si l’indice monte, la durée est prorogée. A contrario, si ce dernier baisse, le terme est raccourci. Ce mécanisme a l’avantage de permettre de garder une parfaite maîtrise de son budget.
Important : privilégiez les offres proposant un cap de durée, par exemple 5 ans. En cas de hausse très importante, la durée ne sera pas prolongée au-delà de cette limite.
À noter que lorsque l’allongement de la durée de remboursement ne suffit pas à absorber la hausse de l’indice, celle-ci se répercute sur la mensualité pour le complément. Dans tous les cas, vous devez vous attendre à une augmentation du coût du crédit.
Passer d un taux variable à un taux fixe
Après un délai d’attente, l’emprunteur a la possibilité de basculer sur une offre à taux fixe, mais cette option ne représente pas toujours un avantage. En effet, au lieu de faire bénéficier son client des meilleurs taux du moment, la banque va se baser sur un nouvel indice, qui est le plus souvent l’OAT (Obligations Assimilables du Trésor) qui sert de base aux taux à long terme.
Avant d’aller plus loin dans la négociation, nous vous conseillons lors des premiers entretiens avec votre banquier de demander comment s’effectue le changement et d’établir une simulation sur les bases des taux actuels.
Important : il est conseillé d’intégrer les trois mécanismes de sécurité, à savoir un taux capé (1 de préférence), un report de l’impact de la hausse sur la durée (et non sur la mensualité) et un passage à un taux fixe.
Les alternatives
Les crédits mixtes
Depuis quelques années, les banques proposent des prêts immobiliers mixtes appelés aussi double palier qui constituent un bon compromis entre les offres à taux fixe et les formules à taux variable. Ces contrats prévoient deux périodes successives de remboursement :
- Une première période où le taux est « neutralisé » sur une durée de remboursement définie à l’avance pouvant aller jusqu’à dix ans, ce qui l’apparente à un taux fixe.
- Une seconde période allant jusqu’au terme et basée sur un taux révisable, par exemple un prêt variable capé 1.
Important : sachez que les taux de la première période sont en général supérieurs à ceux proposés par le marché des taux fixes.
Les prêts à double indexation
Particulièrement rare et plus complexe, le crédit immobilier à double indexation a la particularité d’être basé sur deux index distincts :
- Un index financier à court terme, généralement l’EURIBOR, dont la variation impacte le taux d’intérêt.
- L’indice INSEE des prix à la consommation qui agit directement sur la mensualité.
La hausse quasi inéluctable du coût de la vie a pour objectif d’amortir partiellement celle de l’indice et in fine celle du taux variable. Une forte variation de l’index de référence ne manquera pas toutefois d’impacter le prêt immobilier, se traduisant alors par un allongement de la durée ou une hausse de l’échéance.
En cas de difficulté
Renégocier un prêt immobilier a taux variable
Afin de sécuriser votre prêt et éviter les conditions pénalisantes d’un passage à taux fixe, vous avez sans doute intérêt à renégocier votre crédit auprès d’une autre banque. Vous pourrez ainsi faire jouer la concurrence et bénéficier des meilleurs taux du marché.
Vous devrez en revanche payer à nouveau des frais de garantie et de dossier, mais vous bénéficierez néanmoins de l’absence de pénalités de remboursement anticipé.
À savoir : en cas d’inscription hypothécaire sur le prêt en cours, vous devez rajouter les frais de mainlevée.
Remboursement anticipé
Contrairement aux offres à taux fixe, les prêts variables permettent à l’emprunteur de rembourser par anticipation sans frais tout ou partie de son emprunt immobilier. Un avantage important si vous pensez revendre le bien avant le terme.
Pour rappel, les pénalités sont égales à 6 mois d’intérêts avec un montant plafonné à 3 % du capital restant dû.
Notre analyse : attention aux clauses qui excluent la gratuité des indemnités de remboursement anticipé en cas de rachat par la concurrence.
Modularité
Vérifiez si votre contrat de prêt comporte, comme c’est le cas pour la plupart des offres bancaires récentes, une clause de modulation. Si cette option est inscrite dans l’offre, vous pouvez en cas de remontée des taux d’intérêt, diminuer ou suspendre vos mensualités d’une année maximum.
Cette souplesse comporte toutefois des limites : délais d’attente, plancher de baisse et durée maximum de suspension.
D’autre part, elle ne comporte pas que des avantages puisque le coût du crédit augmente de manière importante, particulièrement en cas d’arrêt des versements. Cette augmentation s’explique par le fait que le capital n’est plus amorti et que les intérêts non payés sont capitalisés jusqu’à la reprise des versements.
Prêt immobilier à taux fixe ou variable ?
En conclusion, il faut avant tout prendre le temps de définir les contours de son projet immobilier et d’analyser sa situation financière.
Le choix est en grande partie de sa capacité financière. Si vous pensez que le taux révisable est adapté à votre situation, il vous faut étudier chaque détail des conditions de l’offre et tenter de bénéficier de tous les mécanismes de sécurisation : échéance constante, taux capé, passage à taux fixe, etc.
Par ailleurs, si vous optez pour une délégation d’assurance, sachez que la variation du taux peut avoir une incidence (à la hausse ou à la baisse) sur la cotisation. En effet, la plupart des contrats externes sont basés sur le capital restant dû à la différence des contrats groupes bancaires, dont les cotisations d’assurance sont basés sur le capital initial.
Enfin, pensez à la solution du prêt immobilier mixte qui combine sur un seul emprunt, un taux variable et un taux fixe et qui s’avère un bon compromis.